Saleh Al-Jafarawi : la caméra qui n’a jamais cessé de croire
À Gaza, là où le bruit des bombes remplace souvent celui des vagues, un jeune homme tenait bon.
Saleh Al-Jafarawi n’était pas seulement un journaliste : il était un témoin, un croyant, un sportif, un rêveur, et surtout un homme libre.
Jusqu’à sa dernière image, il a prouvé que la vérité peut survivre à la peur.
De Gaza à la lumière
Né en 1997 dans la bande de Gaza, Saleh Amer Al-Jafarawi grandit dans une famille modeste mais profondément attachée à la foi et à l’éducation.
Dès son plus jeune âge, il apprend le Saint Coran par cœur, trouvant dans la parole divine une force intérieure qui guidera toute sa vie.
À l’école, il se distingue par sa curiosité et son esprit de discipline. En parallèle, il développe une passion pour le tennis de table, discipline dans laquelle il brille rapidement.
Il représente son université et des clubs locaux dans plusieurs tournois nationaux et régionaux, incarnant la rigueur et la combativité qui marqueront aussi son parcours journalistique.
« Jouer et raconter, c’est la même chose : il faut du courage, de la précision et du respect. »
Saleh Al-Jafarawi
Après avoir obtenu sa licence en journalisme à l’Université islamique de Gaza en 2019, il décide de consacrer sa vie à l’image et à la vérité.
Sans moyens, sans équipe, mais avec une conviction inébranlable, il commence à filmer et à documenter la vie quotidienne de son peuple.
Une caméra face à la guerre
Dès 2020, ses reportages publiés sur Twitter (X), Instagram et YouTube séduisent par leur authenticité.
Saleh montre Gaza autrement : des familles qui sourient malgré les ruines, des enfants jouant parmi les décombres, des gestes simples de solidarité.
Lorsque la guerre éclate en octobre 2023, il devient la voix d’une population enfermée sous les bombes.
Toujours en première ligne, caméra à la main, il filme les scènes que les grandes chaînes internationales ne peuvent atteindre.
« Nous ne faisons pas de l’héroïsme.
Nous montrons simplement la vérité telle qu’elle est. »
Ses images, d’une humanité bouleversante, franchissent les frontières.
Elles transforment un simple journaliste de Gaza en symbole universel de résistance et de vérité.
Son testament journalistique
Quelques jours avant sa mort, Saleh publie un message qui ressemble à une prière, une profession de foi adressée à tous les jeunes reporters :
“Si je meurs un jour, ne pleurez pas trop.
Prenez la caméra et continuez la route.
Filmez chaque injustice, chaque maison détruite, chaque enfant qui sourit malgré la douleur.
Ne laissez pas la vérité mourir deux fois : une fois sous les bombes, une fois dans le silence.”
Ces mots, partagés des milliers de fois après sa disparition, résonnent aujourd’hui comme un héritage moral et professionnel pour toute une génération de journalistes.
L’enlèvement et la mort
Le 12 octobre 2025, alors qu’il couvre des affrontements dans le quartier d’Al-Sabra, à Gaza, Saleh est enlevé par un groupe armé.
Quelques heures plus tard, son corps est retrouvé, abattu de plusieurs balles à la tête et à la poitrine.
Les circonstances demeurent floues.
Certains parlent d’un règlement de comptes interne, d’autres d’un assassinat politique.
Mais au-delà des hypothèses, un fait demeure : un jeune homme de 27 ans, armé seulement de sa caméra, a été réduit au silence.
Une onde de choc et un adieu national
La nouvelle de sa mort provoque une émotion immense.
Des milliers de Gazaouis accompagnent son cercueil, les journalistes portent leurs caméras comme des torches funèbres.
Sur les réseaux, des hommages affluent du monde entier.
Ses collègues le décrivent comme un modèle de courage, de foi et de dignité.
Une amie écrit sur Facebook :
« Saleh disait que la caméra ne ment jamais.
Aujourd’hui, c’est elle qui raconte son histoire. »
Un héritage entre foi, sport et vérité
Ce qui rend Saleh unique, c’est la manière dont il a su unir la rigueur du sportif, la patience du croyant et la conscience du journaliste.
Il voyait dans la quête de vérité la même exigence que dans le sport : la discipline, l’effort, la concentration.
Et dans la foi, il trouvait la paix intérieure nécessaire pour affronter l’horreur du monde.
Ses vidéos continuent d’être utilisées par des ONG et des médias internationaux comme preuves documentaires des crimes commis à Gaza.
Son nom est devenu synonyme de vérité et d’intégrité, bien au-delà des frontières palestiniennes.
La mémoire continue
Aujourd’hui, ses pages sur les réseaux sociaux servent de mémoire vivante.
Ses amis y partagent ses photos, ses phrases, ses reportages.
Chaque image, chaque mot, rappelle que la lumière peut naître même au cœur du chaos.
“Quand la caméra s’éteint, la mémoire demeure.
Et tant qu’on se souvient, la vérité respire encore.”